Candidats au CNB, nous nous sommes penchés sur la situation de la profession et de ses institutions. Pour y voir clair. Et asseoir nos propositions sur des bases solides.
La multiplicité des sources (CNB, Ministère de la justice, CNBF, Barreau de Paris, Conférence des Bâtonniers, ANAFAA, Institut Montesquieu, Juristes associés …), partielles, fragmentaires, parfois biaisées, ne facilite pas la tâche.
Pour vous permettre à vous aussi d’y voir clair, et de voter, en toute connaissance de cause, voici les principaux chiffres-clés que nous avons retenus.
Le nombre d’avocats a doublé quand les revenus ont triplé
Evolution de l’assiette totale des cotisations (CNBF, 2015)
Le nombre d’avocats a plus que doublé en France en 20 ans, tous barreaux confondus : 29 368 avocats en 1995 à 58 596 avocats en 2014 (63 900 en 2016).
Entre 1995 et 2014, les bénéfices générés collectivement par la profession* ont en revanche, triplé : passant de 1,5 milliard d’euros à 4,4 milliards d’euros.
Cette croissance de l’activité qui profitait à l’ensemble de la profession est désormais captée par une minorité de cabinets.
Des revenus en recul
Entre 2010-2014, alors que le revenu global de la profession progressait de 23 % et le nombre d’avocats de 19 %, le revenu moyen des avocats a reculé. Le revenu médian a baissé de 5 %
Évolution des recettes brutes 2010-2014 en € (Source : ANAFAA)
Pour cette période, ce sont les avocats individuels qui accusent la baisse de revenus la plus marquée : – 7,4 %, selon l’ANAFAA.
Le chiffre d’affaires des grands cabinets d’affaires a connu, en revanche, une insolente croissante de 15% en 2016. Depuis 1991, il s’est accru, en France, de près de 570 % quand leurs effectifs n’augmentaient que de 122 % (Source : « Juristes associés »).
Des écarts de revenus qui continuent de creuser
50 % des avocats ont perçu en 2014 un revenu moyen inférieur à 43 850 euros. Et 25 % un revenu moyen de 14 790 euros.
Les disparités de revenus (CNBF, rapport 2015)
3,4 % des avocats (1 967 confrères) perçoivent à eux seuls autant de revenus que 63 % d’entre nous (36 890).
Les disparités de revenus à Paris (CNBF, rapport 2015)
L’écart est encore plus marqué à Paris : 2,9 % y perçoivent autant de revenus que 66,8 %.
Le CNB est parvenu à s’imposer comme le principal interlocuteur des Pouvoirs publics. On lui doit l’unification des règles et usages de la profession. Il est en charge de notre formation professionnelle. Nous attendons du CNB qu’il se montre plus attentif au sort des collaborateurs et plus au fossé qui ne cesse de se creuser entre l’immense majorité des avocats et l’oligarchie des patrons et associés de grandes structures.
Le barreau à l’avant-garde… du sexisme ?
Le nombre de femmes dans la profession a progressé de 61 % depuis 2004, contre 23 % pour les hommes.
Les inégalités ne cessent de se creuser tout au long de leur carrière. Leur revenu moyen plafonne à 83 % à celui des hommes de la première année d’exercice. Il chute à 70 % la 5e année. Leur revenu moyen sur toute la carrière est de moitié inférieur (51 %) à celui des hommes (Source : CNBF).
Les femmes ne représentent que 24,5 % des associés (17 % dans le droit des affaires) selon le Baromètre de la Mixité. Parallèlement, la proportion de femmes collaboratrices au sein des effectifs des cabinets ne cesse de croître : plus de 60 % des effectifs (83 % dans le droit des affaires)
Ces disparités ne s’expliquent pas par la durée de travail des femmes (96 % des femmes avocates à Paris travaillent à temps plein), ni par un éventuel investissement, par les femmes, de spécialités juridiques moins rentables : 40 % des femmes occupent désormais des spécialités réputées rémunératrices.
Si la lutte contre les discriminations est du ressort, en premier lieu, des Barreaux, le moment est venu pour le CNB, dont la composition est désormais paritaire, de s’en saisir.
Des revenus avocat hors taxes et charges
Lorsqu’un avocat encaisse 1 200 euros d’honoraires TTC, 200 repartent au Trésor Public au titre de la TVA. A ses honoraires HT s’appliquent ensuite ses charges (l’ANAFAA les évalue à 64,5 %). Ses honoraires nets (avant impôt sur le revenu) seront donc de 355 euros.
En d’autres termes, lorsqu’un avocat encaisse 500 euros TTC, il perçoit en réalité un revenu net de 148 euros. S’il encaisse 1 000 ou 2 000 ou 4 000 euros, il ne percevra respectivement que 296, 591 ou 888 euros.
Pour prétendre à un revenu net de 1 500 euros l’avocat devra encaisser mensuellement 5 070 euros TTC ; 6 760 pour un revenu de 2000 euros. Et 10 140 pour un revenu de 3 000 euros. (Source : ANAAFA).
Un budget du CNB et des cotisations qui montent en flèche
Le budget du CNB est inférieur de moitié (28 millions d’euros) à celui de l’Ordre parisien (62 millions d’euros). Le CNB n’a pas la folie des grandeurs. Pour l’instant. Son fonctionnement et les charges pèsent respectivement 16,6 % et 33 % de son budget. Il est permis de s’interroger sur le coût de ses locaux (7 %). Son budget communication tend, en revanche, à exploser (11,50 %). Enfin, ses projets numériques (e-barreau, cloud privé, RPVA) risquent de mobiliser des ressources croissantes (19 %). Le budget du CNB a augmenté de 9 % en 2016. Et quasiment doublé en dix ans.
Nous inscrirons à l’ordre du jour du CNB une refonte du mode de calcul des cotisations pour prendre en compte les revenus et le rendre progressif. Le montant des cotisations au CNB est aujourd’hui, comme chacun le sait, ou ne le sait pas, fixe et déconnecté des revenus.
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* Il ne s’agit ici que des revenus soumis aux cotisations à la CNBF : hors taxations et dans la limite des plafonds du régime de base et du régime complémentaire). On peut regretter le choix de la CNBF de diffuser ces données par quartiles ce qui pour effet de lisser les inégalités.